« En matière d’information scientifique, la gestion de la crise actuelle a été un fiasco » Laurent-Henri Vignaud

« En matière d’information scientifique, la gestion de la crise actuelle a été un fiasco »  Laurent-Henri Vignaud

Comment naissent et se répandent les épidémies ? Pourquoi et comment les nouvelles maladies transforment-elles les sociétés ? « Une maladie épidémique, c’est un phénomène social global », rappelle l’historien des sciences biologiques Laurent-Henri Vignaud. Entretien.

Basta !  : Pourquoi les nouveaux virus semblent-ils provenir pour la plupart d’Orient ? C’est le cas des maladies récentes comme le Covid-19, les syndromes respiratoires – Sras (parti de Chine fin 2002) ou Mers (détecté pour la première fois en 2012 en Arabie saoudite) et des anciennes : la peste et le choléra venaient aussi d’Asie…

Laurent-Henri Vignaud : Il semble qu’il existe un foyer de maladies contagieuses situé quelque part en Asie entre l’Inde et la Chine. La peste noire, bubonique, arriva probablement de Chine, le choléra aussi, lors de la première épidémie européenne au début des années 1830. Pour la grippe dite espagnole, deux thèses coexistent. Selon la version historique officielle, le circuit tel qu’il a pu être reconstitué part du Kansas, aux États-Unis. Ce serait donc une maladie américaine. Aujourd’hui, des études récentes sur le génome du virus envisagent une origine chinoise.

Quand le choléra arrive en Europe, il est perçu comme une maladie exotique, venant d’Inde. C’est la raison pour laquelle cette maladie fait peur. Personne n’est préparé, on ne sait pas, au début, quels sont ses symptômes. On ne sait pas la distinguer d’autres maladies qui sont endémiques à l’Europe, qui y sévissent de manière permanente et qui donnent des diarrhées. À chaque arrivée d’une maladie nouvelle, pour une société, l’adaptation est brutale. Une maladie à laquelle on est habitué peut faire annuellement plus de morts, sera perçue comme moins dangereuse.

Tous ceux qui depuis le début du coronavirus jouent les matamores en le comparant avec les chiffres de la grippe saisonnière et des morts sur la route me laissent pantois. Dans une situation comme aujourd’hui, celle d’un nouveau virus, de tels raisonnements sont faux scientifiquement parlant. Du point de vue de son impact sur une société, comparer le nouveau virus à l’existence d’une maladie endémique que les populations connaissent bien n’a pas de sens.

Sait-on pourquoi cette zone entre l’Inde et la Chine est un tel foyer de maladies ?

Pour ce qui est du Covid-19, la source est connue. Comme de nombreuses maladies de ce type déjà rencontrées, de type grippe porcine ou aviaire, elle est liée à l’habitude des populations asiatiques de pratiquer ce qu’on appelle le marché vivant, avec des animaux vivants, y compris sauvages, qu’on va ensuite consommer. Cela favorise ce type de maladies qu’on appelle des anthropozoonoses : des transferts de virus d’espèces animales à l’espèce humaine. Ici, le virus est chinois peut-être principalement en raison des habitudes alimentaires et de commerce des animaux …

La suite ici sur le site de Basta.

Laurent-Henri Vignaud est maître de conférence en histoire moderne à l’université de Bourgogne. Il est l’auteur, avec Françoise Salvadori, de l’ouvrage Antivax : la résistance aux vaccins du XVIIIe siècle à nos jours (Vendémaire, 2019) et de Sciences, techniques, pouvoirs et sociétés du XVe siècle au XVIIIe siècle (Dunod, 2016).


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