Vaincre la pandémie, abattre les oligarchies financières

Vice-président du Conseil consultatif des Droits de l’Homme des Nations-unies depuis 2009, Jean Ziegler y a auparavant occupé le poste de Rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation pendant huit ans. Auteur de nombreux livres traduits dans le monde entier, il compte au nombre des principales figures de la critique du néolibéralisme et de ses conséquences sociales dans les pays de l’hémisphère Sud. Dans cet article, il revient sur les défaillances structurelles que révèle la pandémie de coronavirus dans l’ordre mondial contemporain et ébauche des pistes pour son dépassement.
Durant la première vague européenne de la pandémie du coronavirus (Covid 19), du 1er mars au 30 mai 2020, deux stratégies propres au capitalisme financier globalisé se sont révélées particulièrement meurtrières : celle du recours à la loi des coûts comparatifs des frais de production et celle de la maximisation des profits. Jusqu’au début du déconfinement en Europe, l’épidémie a fait dans le monde plus de 375 000 morts, dont près de 100 000 aux États-Unis, de 36 000 au Royaume-Uni, plus de 32 000 en Italie, de 28 000 en France, de 26 000 en Espagne et de 23 000 au Brésil. En Europe, les victimes meurent principalement dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD en France) et dans les hôpitaux.
Le 29 mai 2020 à 14 h, la situation en France était la suivante : 28 714 décès depuis le 1er mars 2020, dont 18 387 à l’hôpital et 10 327 dans les EHPAD. Il n’existe pas de chiffres fiables pour les morts du virus survenus à domicile1. En EHPAD, l’agonie des victimes est souvent cruelle.