1981 ou le courage des idées

1981 ou le courage des idées

C’était il y a 40 ans. La victoire de François Mitterrand à la présidentielle. Tout un symbole pour la gauche. Et un héritage qu’il faut savoir regarder, aujourd’hui, en 2021.

16 mars 1981. François Mitterrand participe à l’émission politique « Cartes sur table » présentée par Alain Duhamel et Jean-Pierre Elkabbach sur Antenne 2. Fin de l’émission : « Monsieur Mitterrand, ça fait 1h20 que nous sommes ensemble. Nous avons donc chacun une dernière question à vous poser. La mienne est celle-ci : il y a actuellement cinq condamnés à mort dans des cellules. Je voudrais savoir si vous étiez élu président de la République, si vous les gracieriez ». De l’aveu même de celui qui pose cette question, Alain Duhamel, il n’avait pas prévu d’interroger le candidat socialiste sur ses intentions concernant la peine de mort. Trop sensible. D’autant qu’en mars 1981, les sondages donnent les deux qualifiés du second tour, Mitterrand et Giscard, à égalité parfaite. Tout est encore possible et le moindre écart pourrait être fatal. À ce moment-là, un sondage affirme que 63% des Français souhaitent le maintien de la peine de mort. Une minute avant même de lui adresser une dernière question, Duhamel reconnaît ne toujours pas savoir qu’il entraînerait Mitterrand sur ce terrain glissant. Et s’il reconnait volontiers aujourd’hui qu’il ne souhaitait pas la victoire du socialiste, le journaliste avoue avoir pris conscience du tournant qu’allait prendre cette fin de campagne électorale, au moment même de l’interroger sur la peine de mort.

La réponse, grave, de François Mitterrand restera comme l’un des grands moments de vérité et d’intégrité de l’histoire politique contemporaine, qui font tant défaut à la politique – sans doute aujourd’hui plus encore qu’hier. La vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Quitte à fâcher l’opinion. Ainsi lâche-t-il : « Pas plus sur cette question que sur les autres, je ne cacherai ma pensée. Et je n’ai pas du tout l’intention de mener ce combat à la face du pays en faisant semblant d’être ce que je ne suis pas. Dans ma conscience profonde qui rejoint celle des Églises, l’Église catholique, les Églises réformées, la religion juive, la totalité des grandes associations humanitaires, internationale et nationale, dans ma conscience, dans le fort de ma conscience, je suis contre la peine de mort. Et je n’ai pas besoin de lire les sondages qui disent le contraire. Une opinion majoritaire est pour la peine de mort. Je suis candidat à la présidence de la République et je demande une majorité de suffrages aux Français, mais je ne la demande pas dans le secret de ma pensée. Je dis ce que je pense, ce à quoi j’adhère, ce à quoi je crois, ce à quoi se rattachent mes adhésions spirituelles, ma croyance, mon souci de la civilisation. Je ne suis pas favorable à la peine de mort ». Et de conclure sur le pouvoir « excessif d’un seul homme de disposer de la vie d’un autre ».

La suite sur le site de Regards.


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